SOIRÉE CINÉ - Épisode 2
NDLR : pour mieux comprendre cet article, je vous recommande de lire l’épisode précédent par ici. Vous pourrez apprécier l’oeuvre dans son ensemble.
Samedi dernier je décide d’aller voir cet événement cinématographique qu’est BABYLON. Ayant beaucoup aimé les 2 précédentes réalisations virtuoses de Damien Chazelle (Whiplash & La la land), je n’avais pas envie d’attendre plus longtemps. Surtout qu’il était projeté dans l’un de mes 2 lieux favoris : le Diagonal.
Le film durant 3h08, il n’y a que 3 projections par jour dans la grande salle. La première autour de 13h, la seconde 16h15 et la dernière vers 20h30. J’ai pensé si je vais à la première je risque de dormir. Oui, arrivé à un certain âge on peut difficilement résister à la tranche horaire 14/16h. Lors de ma dernière tentative pendant un film Iranien en début d’après-midi, ce fut un désastre. Un vrai paradoxe me direz-vous pour un mec qui a du mal avec le sommeil… mais la nuit… Oui je sais. Difficile à comprendre. En revanche entre 14 et 16 j’ai mes faiblesses. Y’en a qui ont les démons de midi, moi c’est un peu après.
J’arrive sans trop de pression vers 16h05 mais en ayant oublié un détail crucial. On est samedi. Samedi après-midi à Montpellier. Autrement dit l’horaire parfait pour la disponibilité des gens en général, l’horaire parfait pour qui voudrait sortir après, le film parfait pour réunir un peu plus que la population aux tempes grisonnantes tendance extrémiste téléramesque. Vous l’aurez compris : y’avait foule !
Le choix de la place habituellement très confort dans ce cinéma, là c’était plus du tout la même musique ! Mais confiant en ce lieu que je connais par coeur, je n’imagine pas un seul instant que la salle sera pleine. Donc je choisis une place par défaut, assez près de l’écran, trop à mon goût mais à la recherche du calme, ça va aller.
16h15 : le film ne démarre pas. Les couples et les groupes continuent d’arriver en masse. À cet instant je ne panique pas.
Plusieurs jeunes filles s’installent devant. Après de longues hésitations, elles s’assoient. Je prie intérieurement pour que celle qui a des cheveux magnifiques mais d’un volume à la Jackson Five se décale. Pim, elle se met juste à l’endroit que j’avais imaginé… Mon côté Devin probablement. Là je commence à me projeter dans ce film en V.O. Les sous-titres s’ils sont vraiment en bas de l’écran, va me manquer pas mal de lettres, des mots entiers. Bien que mon anglais ait progressé ces derniers temps, ça pourrait se corser. Je décide de me décaler vers la droite en expliquant à mon voisin qu’il n’y est pour rien en mimant la tignasse que je n’ai évidemment pas sur la tête. Juste les racines. Je suis adepte du minimalisme. Il rit. Mon nouveau placement me confirme l’essentiel : ça va être bien mieux même si je me décentre de plus en plus aussi près de cet écran…
Là arrive un couple. Du moins ce que j’imagine. J’ai failli écrire un couple chelou mais comme je ne veux pas passer pour un gars qui juge facilement ou met dans des cases, je garde ça pour moi. Ils me demandent si à ma gauche les places sont libres. Oui elles le sont. Ils s’installent. Leur aisance vocale accompagnée d’une petite ambiance alcoolisée m’interpelle… Mais bon, Guillaume, essaie de ne pas être sauvage. Il faut de tout etc. Le gars se lève juste avant que ça ne démarre pour aller aux toilettes j’imagine. Mais non, elle l’interpelle sa moitié du jour : « Tu prends plutôt des chips hein ? »
Putain de bordel de merde (1), pas une fois ça m’était arrivé en 10 ans. Et là 2 fois en 15 jours ! Mon seul espoir ? Je ne crois pas avoir jamais vu de chips dans le distributeur de l’entrée mais à cet instant toutes mes certitudes réconfortantes en ont pris un sérieux coup ! Guillaume respire… Surtout que les places maintenant, y’en avait plus beaucoup de libres. Ou alors collées à cet écran immense.
Le gars revient et on l’a échappé belle : des M&M’s ! Yesssss ! Oui on se contente de ce qu’on peut quand on a connu le pire. Sauf qu’entre temps, pendant son excursion de survie alimentaire du côté du distributeur automatique, elle s’était hydratée la gente dame… Et en voyant sa bouteille d’eau de source à la couleur légèrement ambrée, j’ai compris que j’avais bon. Elle était bourrée. Ils commencent à bouffer leur merde (désolé pour la répétition de ce mot mais je n'ai trouvé aucune équivalence en langage soutenu) dès le début du film. Pourquoi attendre en effet ? Non, je ne vais pas tenter d’écrire ici les bruitages correspondants, je fais confiance à votre imagination. Tu te sens coincé. De plus en plus. Surtout qu’entre temps, une mère et sa fille sont venues se mettre à ta droite. Plus aucun moyen de se décaler et le film a commencé.
Respire.
Respire.
Respire.
Cinq bonnes minutes après le début de ce Babylon arrive un couple de jeunes. Lui plutôt grand avec une putain(1) de coiffure aux dimensions « trop ». Vous imaginez le plan n’est ce pas ? Je vous devine avec vos sourires en vous disant non, quand même, il va pas cumuler à ce point ?
Si.
Il peut.
Respire.
Je tente de ne pas me mettre dans la posture victimaire, donc je me dis si ça va aux autres, alors je tente des mouvements de la tête pour contourner les obstacles à chaque nouvelle réplique… Mais je ne suis pas les autres ! Et si ça leur va j’ai le droit de penser que ça m’va pas du tout du tout ! J’ai beau faire tous les efforts du monde, ce gars il me cache un tiers des sous-titres !!! Si j’additionne ça aux interventions très sonores de la nana bourrée et à l’écrasement buccal des cacahuètes chocolatées du mec à ma gauche : c’est trop. Beaucoup trop. J’hésite à me barrer. J’étouffe. Je suis oppressé. Tant pis pour les 4 euros 50 (2). Je reviendrai.
Mais je me décide enfin à changer de place. Tellement insupportable.
Alors je vais au premier rang, sous l’écran. Là j’en ai au moins une de certitude à cet instant : personne ne peut se mettre devant ! Personne. Et si c’est le cas, on ne pourra même plus parler de scoumoune. Je mériterai carrément le livre des records ! Le GUINNESS ! Enfin une reconnaissance digne de ce nom !
L’adaptation fut difficile visuellement. Un gros effort. Fatigant. Je vous rappelle la durée, un peu plus de trois heures. Je retournerai le voir dans de meilleures conditions pour apprécier les images, le son. Parce que ce festival visuel et sonore mérite un peu plus de confort.
Le bilan ? Force est de constater que ma théorie de l’épisode 1 s'effondre totalement ! Je me réjouissais de penser qu'ici, dans ce lieu, j’étais protégé, tranquille. Puis non. La probabilité que ça arrive est plus faible mais s’il y a le nombre, si le film est potentiellement Grand Public, la promiscuité d’une petite foule ouvre la porte à tous les champs du possible…
Je n’irai plus voir que des oeuvres polonaises sous-titrées en coréen. Je pense qu’elle est là la solution. Même si je pourrais vous raconter d’autres magnifiques expériences où on était 3 dans la salle, la quatrième personne arrive et elle s’installe tranquillement devant toi. Sans aucune hésitation. Je pourrais. Mais non. Il faut toujours garder le meilleur pour soi.
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(1) Je m’énerve pas Madeleine…
(2) Cette précision m’a semblé nécessaire pour celles et ceux qui continuent de dire haut et fort que le cinéma c’est cher ! Alors oui évidemment on n’est pas sur le même type de programmation si on compare l’UTOPIA et le DIAGONAL aux grosses écuries un peu plus dans la rentabilité et le business. Puis faut prendre la carte 15 places. Mais dans ces deux cinémas Art et Essai montpelliérains : la culture est à la portée de pas mal de bourses. Même en "tarif normal" : 7,50 € et 6,50 € ! C’est parti ?